Morlaix

Morlaix, 27/10/2024

À Morlaix, j’y suis, c’est de là que je pars quand j’en pars, cependant, à Morlaix, il y a de petits tours qui vous font comme une destination. La propriétaire de la maison de la reine Anne fait visiter la demeure vêtue d’un anorak, et, durant la demi-heure à l’écouter, on passe d’un pied sur l’autre en attendant de regagner un ciel clément. Toute la beauté de l’édifice réside dans l’immense poutre maîtresse sculptée desservant les niches permettant d’accéder aux étages. J’examine cette contradiction entre l’anorak et l’unicité de l’ouvrage. Ici, règnent le froid et l’histoire. Le lieu n’est pas vivable, au sens que nous lui accordons, nous, modernes. Mais, en dépit de son hostilité, quelque chose de son exceptionnalité déteint sur nous, il dépose son empreinte en notre esprit, va-et-vient des siècles et des êtres. C’est ainsi que cette maison voisine, la maison de mon paysage, a appelé l’expérience de la maison d’Angers. Chargée de schiste et de pierre de tuffeau, de tomettes et de dalles de terre cuite, elle impose sa minéralité à l’opposé de l’attente domestique que seraient des murs de papier peint ou des parois lambrissées. Elle provoque ce léger frisson, cette crainte que jamais le corps ne s’y dépose, qu’il demeure en alerte, d’un maintien raide sous la raideur bâtie. Simultanément, de sa voix des tréfonds, elle vous enrobe, et vous voilà parée de temps, de chroniques et de fables, vous excédant vous-même.