Guimaëc

Guimaëc, 25/11/2024

De la vitre du car, je l’ai aperçue, en robe de chambre et pantoufles, extrayant de la boîte aux lettres au bord de la route le courrier du jour. Son négligé eut un curieux effet sur moi. Plutôt que de me repousser, l’associant à la désinvolture de la nuit, à la laideur d’une vêture de l’intime, j’ai surpris son audace matinale avec envie. De l’autre côté de l’allée, l’attendait la maison, le petit-déjeuner bienveillant, un rapide détour dans le froid, sans même le temps d’être épiée du voisinage, et le journal se déploierait avec ses titres ronronnant les faits divers alentour.

Cette image dérobée me fut comme la brusque révélation d’un moment de simplicité prometteur. J’avais pour obsession mes efforts et mon emploi du temps, j’aurais pu laisser tout cela, en vrac, derrière moi, abandonner toute requête, vivre cette vie dépouillée de prétention, d’ambition, de revendication, dans le goût humble du bol de café et de la tartine. Mes claquettes dans les gravillons, évitant la rosée des massifs, j’aurais pu aimer ce quotidien apaisant, une lettre, un dépliant publicitaire vantant les promotions ultimes, le menu de midi dans la tête et la visite à la boulangerie.

Le car a poursuivi sa course et moi aussi je crois.