
Morlaix, 21/05/2025
Tandis que j’attendais le bus, j’ai observé un employé municipal s’activer tout autour de l’abri, collectant les mégots, vidant les poubelles publiques, il m’a saluée lorsque nos regards se sont croisés, j’en ai profité pour le remercier de ce travail ingrat et mal récompensé qui fait quotidiennement les rues des villes vivables et salubres. Il était manifestement content de mon encouragement matinal, j’étais moi-même contente de mesurer la réalité de ces tâches invisibles qu’aucun discours politique ne nous invite jamais à estimer. Mais avant cet échange, regardant son assiduité à faire disparaître les négligences des uns et des autres, je n’ai pu m’empêcher d’évaluer cette injustice qui fait de mon métier un métier encouragé, applaudi, alors que par bien des aspects il n’est pas sans vanité. Combien de fois me suis-je dit, mettant en regard deux ou trois romans que j’avais choisis un peu arbitrairement, que les chapitres d’analyse qui en découleraient indifféraient au monde, qu’ils ne le faisaient ni aller mieux, ni prospérer, ni changer en aucune façon. Et lui, dans son costume fluo, ignoré, voire méprisé, il fallait qu’il se mette en grève pour qu’en quelques jours l’on pousse des cris, les odeurs, les rats, les déchets, pour que l’on aperçoive son rôle décisif puis qu’on l’oublie à peine les trottoirs revenus à une satisfaisante propreté.