Perros-Guirec

Perros-Guirec 04/06/2025

Le colloquium, la conversation, m’apparaît toujours comme la subtile combinaison d’incitation et d’imposition au silence. Lors de ces rencontres savantes, s’établit très vite une discrimination entre celles et ceux qui appartiennent au cercle élu et celles et ceux dont le statut n’est à la rigueur que d’écoute. Lorsque le colloque s’étend sur plusieurs journées, obligeant au partage d’activités quotidiennes, qui ne se limitent pas aux heures dans l’amphithéâtre mais s’étendent aux repas et aux salutations dans les couloirs, se tissent des liens apparents nécessaires à la traversée supportable de l’expérience. J’entends par liens apparents ces affinités superficielles, venues d’une proximité institutionnelle, d’un champ commun de recherche ou simplement de mode vestimentaire, de sourire spontané, de gueule en somme. À l’exception de cas rares d’amitiés à venir, l’idée consiste essentiellement à lutter contre la solitude inévitable dans ce soudain agrégat de personnes venues de géographies diverses. Justement, pour les organisatrices, les organisateurs, l’association d’une thématique aride et d’un lieu de villégiature tel que Perros-Guirec s’entend comme le moyen d’aimanter les participations et de faire courir le monde. Ce mois de juin commençant est plutôt récalcitrant, nuageux et froid, il n’offre qu’un ciel grisé au-dessus de la plage, si bien que se serrer les uns contre les autres se comprend comme la compensation obligée aux frimas, pour qui s’imaginait furetant sur les sables aux heures de liberté. Ce coude-à-coude ne contrevient pas à la hiérarchie implacable de ces assemblées où le critère de l’expérience, de la notoriété, de l’appartenance idéologique, de l’autorité des publications, la pertinence ou l’ironie du discours vous élèvent ou vous nient : ainsi en va-t-il comme pour le toponyme Perros, l’extrémité, le promontoire, en ces confins vous êtes poussé à bout.